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Essais
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De proche en proche : Une famille ordinaire dans l'Histoire de France
Emma Rothschild
- Le Seuil
- L'univers Historique
- 10 Janvier 2025
- 9782021516791
Par une sombre après-midi d'hiver, en 1764, dans la ville paisible d'Angoulême, 83 personnes se réunissent pour signer un contrat prénuptial pour la fille d'une certaine Marie Aymard, une veuve illettrée. Ce même nom apparaît sur une procuration concernant les biens de son défunt mari, un menuisier parti travailler sur l'île de Grenade. Deux documents conservés dans les archives : voilà tout ce qu'il reste de son existence. C'est peu au regard de l'épaisseur d'une vie, mais, pour qui sait les lire attentivement, ce point de départ est suffisant pour essayer d'écrire l'histoire de Marie et de ses descendants. Emma Rothschild se lance dans l'aventure et plonge le lecteur dans une enquête historique de grande ampleur, sur cinq générations.
Les membres de l'obscure famille Aymard n'ont laissé derrière eux presque aucune lettre personnelle. Certains ont voyagé jusqu'en Syrie, au Mexique et à Tahiti, d'autres sont restés à Angoulême. Leurs fortunes sont diverses : à la dernière génération, celle que l'on suit jusqu'en 1906, on trouve une couturière impécunieuse demeurant à Paris, et le cardinal Lavigerie, archevêque d'Alger.
Qu'est-ce que le destin d'une famille ordinaire peut nous dire sur les mobilités sociales et les mutations économiques d'un long XIXe siècle ? Beaucoup, c'est le pari des romanciers. C'est aussi celui que relève avec brio Emma Rothschild, en historienne. -
Retraçant l'itinéraire libre et personnel d'une grande historienne, ce livre nous fait visiter, dans les pas d'Annette Wieviorka, une multitude de lieux emblématiques qu'elle a fréquentés, qui lui sont familiers, qui ont laissé leur empreinte, d'une manière ou d'une autre, dans sa mémoire.
Cette mémoire est notamment celle de la Shoah, à laquelle l'historienne a consacré de nombreux ouvrages et qui est donnée à lire cette fois sous un jour intime. Au gré du flux de souvenirs, nous voyageons à Auschwitz, où les siens furent assassinés, dans la ville de New York, où elle apprit le yiddish sur les traces de son aïeul, nous poussons les portes de l'hôtel Lutetia à Paris, qui accueillit des survivants de la déportation, nous parcourons le Centre de documentation juive contemporaine du Mémorial de la Shoah, où elle fit ses premières armes, Varsovie, et son ghetto, qu'elle découvrit d'abord à travers ses lectures de jeunesse.
Au détour de ces pérégrinations et de quelques chemins de traverse, nous croisons la route de toute une galerie de personnages historiques disparus, rescapés des camps, historiens, hommes politiques, écrivains, penseurs, artistes, que l'autrice a bien connus, admirés, dont elle s'est inspirée, et sur lesquels elle a beaucoup écrit.
Cette déambulation au côté d'Annette Wieviorka dans les méandres de sa mémoire nous offre alors une formidable feuille de route pour traverser toute l'histoire du xxe siècle.
Directrice de recherche honoraire au CNRS et vice-présidente du Conseil supérieur des Archives, spécialiste de l'histoire des Juifs au xxe siècle, Annette Wieviorka est l'autrice de très nombreux ouvrages, dont, chez Albin Michel, Juifs et Polonais (avec Jean-Charles Szurek, 2009), L'Heure d'exactitude. Histoire, mémoire, témoignage (entretiens avec Séverine Nikel, 2011). -
Etty Hillesum (1914-1943) est avec Anne Frank l'autre grande voix néerlandaise de la Shoah. Le journal intime qu'elle a tenu de 1941 à 1943, paru en 1985 sous le titre Une vie bouleversée, a suffi à rendre inoubliable la figure de cette jeune juive d'Amsterdam, morte à Auschwitz à l'âge de vingt-neuf ans. Cependant, en dehors du cheminement spirituel qui a accompagné les deux dernières années de sa courte existence, nous ignorons presque tout d'elle.
Aussi la Fondation Etty Hillesum a-t-elle officiellement chargé l'écrivaine néerlandaise Judith Koelemeijer d'écrire « l'histoire de sa vie ». Une biographie définitive : c'est bien ce que nous livre ici l'autrice, qui a passé dix ans à dépouiller archives et documents inédits, à interroger les rares témoins survivants et leurs descendants, poussant ses recherches jusqu'en Russie, aux États-Unis, en Israël.
Pour la première fois, nous appréhendons Etty dans l'ample contexte de sa famille, de ses amitiés, de ses amours et de son quotidien à Amsterdam sous la botte nazie : étudiante à éclipses, militante antifasciste, jeune femme moderne et sensuelle. Paradoxalement, à mesure que l'étau se resserre, elle sent se libérer en elle des forces insoupçonnées, avant que la catastrophe ne l'amène à « devenir qui elle est ».
Le portrait magistral d'une femme animée d'une foi indéfectible en l'homme. -
En 1990, un pays a disparu. Lorsque le rideau de fer est tombé, l'Allemagne de l'Est a tout simplement cessé d'exister et son souvenir s'est progressivement dissipé. Pendant plus de quarante ans, du lendemain de la Seconde Guerre mondiale à l'aube d'un nouveau millénaire, la RDA a pourtant présenté une identité allemande radicalement différente de tout ce qui l'avait précédée, et de tout ce qui existe aujourd'hui. Solidarité socialiste, police secrète, planification centrale, barbelés : c'était une Allemagne forgée sur les lignes de fracture d'une idéologie et de la géopolitique de la guerre froide.
De l'expérience amère des marxistes allemands exilés en URSS sous le nazisme, futurs ténors du régime est-allemand, en passant par la construction du mur de Berlin en 1961, la relative prospérité des années 1970, puis le développement de l'économie de marché jusqu'à l'effondrement des fondations du socialisme au milieu des années 1980, Katja Hoyer retrace l'histoire de la RDA et affirme qu'en dépit de l'oppression et des difficultés fréquentes, l'Allemagne de l'Est abritait un paysage politique, social et culturel riche, bien plus dynamique que la caricature que l'Ouest en a dessiné pendant la guerre froide.