En réunissant la vingtaine de participants autour d'un thème aussi classique que celui des relations entre l'institution ecclésiale et le courant humaniste, les organisateurs prenaient le risque de parcourir des chemins cent fois empruntés, depuis Jacob Burckhardt ou Ludwig Pastor au moins.
L'angle proposé se voulait original avec un double regard sur l'Italie, épicentre de l'humanisme naissant, et la France méridionale, réceptacle tardif et singulier de ce mouvement. Mais plus encore, la palette très large de méthodes et d'horizons intellectuels regroupant médiévistes et modernistes, historiens de l'Eglise, du droit, des idées, philologues et littéraires a autorisé cette " fécondation croisée ", garante d'une exploitation maximale des recherches novatrices.
A des études de cas ou de personnages particulièrement fouillées, l'un des mérites de cette rencontre a été d'ajouter les dimensions institutionnelles des contacts entre studia humanitatis et Eglise : la curie, l'université, les bibliothèques, les formes de contrôle de la production savante (la censure et l'autocensure) ont ainsi reçu un éclairage nouveau. Preuve, si besoin était, que l'humanisme ne saurait se réduire à un simple mouvement de l'histoire des idées, voire à une variante de l'histoire de l'éloquence.
Agissant comme un révélateur des mutations politiques autant qu'intellectuelles au sein des sociétés tardo-médiévales, les " études d'humanité " mettaient en question, voire en crise, l'institution médiévale qui avait revendiqué le monopole de l'élaboration et de la transmission de la connaissance : l'Eglise. Quelles formes de compromis, de " stratégies d'évitement " ou de contournement, mais aussi d'oppositions frontales ont pris ces contacts, tel est le sens des communications ici réunies.
La statue de Giordano Bruno dressée sur le Campo de Fiori, le procès de Galilée dont la mémoire est toujours présente à travers le théâtre ou les débats de l´Académie pontificale des sciences disent assez combien le destin de la Rome des XVIIe et XVIIIe siècles a été négativement associé à celui de la science moderne et de son avènement conflictuel. Les études réunies dans ce volume, résultat d´un programme collectif de recherche sur la genèse de la culture scientifique européenne, entendent apporter une nouvelle contribution non seulement au dossier de la révolution scientifique en milieu catholique, mais plus largement à celui des relations que chaque société entretient avec les acteurs et la production du savoir et de la science. La focale mise sur Rome, comme milieu social spécifique, comme capitale de la catholicité et comme centre d´une monarchie pontificale en profond renouvellement entre XVIe et XVIIIe siècle, permet de discuter les paradigmes classiques d´une historiographie qui a trop hâtivement relégué le milieu romain à la marge de toute forme d´innovation savante. Il s´agit aussi d´ouvrir de nouvelles pistes de réflexions et de nouveaux chantiers sur les diverses configurations socio-intellectuelles au sein desquelles le travail savant a continué à faire de Rome un centre actif de travail et de production de savoirs.
Justicia est anima civitatis : les vingt-deux contributions rassemblées ici tentent de rendre aux villes une composante fondamentale de leur identité, l´exercice de la justice, tel qu´elles le revendiquent dès que le droit urbain prend corps à partir du XIIe siècle. De la Flandre à l´Italie du Nord et du Centre, la fameuse « Urban belt » de l´Europe ancienne a constitué le champ privilégié de cette recherche pour laquelle les historiens et les historiens du droit ont échangé leurs points de vue. Entre 1200 et 1500, des évolutions chronologiques parfois différenciées ont permis de cerner les transformations du droit écrit et le développement dynamique des nouvelles procédures. En favorisant le pénal, la question a été de comprendre quelles possibilités ont été offertes aux justiciables pour user de différents modes de résolution des conflits et comment les gouvernants des villes ont pu instituer des politiques judiciaires de type étatique. La justice est ainsi apparue comme un pan du lien politique et social des milieux urbains.
La papauté connaît, entre XIVe et XVIIe siècle, des évolutions remarquables qui coïncident avec l'affirmation de l'État en Europe occidentale. La recherche collective internationale dont le présent volume se veut l´écho, aspire à renouveler ce sujet historiographique déjà amplement labouré. Elle tente tout d´abord d´être un pont dressé entre les continents médiévaux et modernes, trop souvent isolés. Elle s´efforce ensuite d´enrayer une tendance traditionnelle à l´analyse distincte que l'on fait de la Curie et de l'État, de la ville de Rome, d'Avignon et des territoires placés sous la souveraineté temporelle du souverain pontife. Le thème retenu a été celui de la difficile et complexe notion de charge publique et d´office, du service du prince au service de l´État et de l´Église. Cette approche ciblée repose sur des études institutionnelles, biographiques ou prosopographiques et permet d´approfondir de manière inédite et originale nos connaissances de cette forme de pouvoir unique qu´est la papauté médiévale et de l´âge moderne.